Médiation animale : Pirouette, le chien qui fait du bien

De la ferme au CDAS : un destin hors du commun 

« J’ai tout de suite remarqué qu’elle allait facilement vers les gens, qu’elle faisait confiance aux humains et que les personnes venaient naturellement vers elle », explique Ghislaine Martigny, maîtresse de Pirouette et référente éducative au Cdas. Avant de travailler dans le social, Pirouette a eu une vie. « Elle vivait dans une ferme, son maître, un agriculteur délaissait ses chiens en raison de problème de santé. Au décès de son maître, Pirouette s’est retrouvée seule et a été recueillie chez la voisine, l’une de mes collègues ». Ghislaine décide alors d’adopter Pirouette. « Elle n’était jamais rentrée dans une maison, mais elle a fait preuve d’une capacité d’adaptation incroyable ». Un jour, la référente éducative l’emmène au travail et constate les effets positifs sur l’équipe. Puis germe l’idée d’intégrer Pirouette à l’accompagnement des familles. « La proposition de Ghislaine a été le point de départ, mais le projet a été porté par toute l’équipe, qui s’est vraiment investie dans cette démarche », souligne Angelina Louapre, responsable du Cdas de Maen Roch, « C’est une chance de pouvoir innover, de faire bouger les lignes dans nos pratiques ». 

En juin 2023 démarre l’expérimentation. Un test bien encadré et balisé, notamment par une charte de présence de Pirouette qui précise les règles de la médiation animale. Un panneau indique la présence aux visiteurs dès l’entrée de l’Espace social commun et culturel. « Nous demandons toujours l’accord des personnes en début d’entretien, nous présentons Pirouette, et au premier rendez-vous, elle est toujours attachée en laisse », précise Ghislaine Martigny. 

Pirouette, la facilitatrice 

La chienne participe aux rencontres avec les familles accompagnées dans le cadre du dispositif APPUI. Destiné aux familles avec des enfants de moins de 6 ans, ce dispositif propre au Cdas des Marches de Bretagne permet de travailler les questions de parentalité. La présence de Pirouette a de multiples effets positifs sur l'accompagnement.  « La présentation de Pirouette permet de décaler, de décentrer les enjeux de l’entretien et facilite les échanges », observe Ghislaine. « Lors des échanges, on observe les interactions avec l’animal pour parler des émotions avec les enfants, pour poser des mots sur des ressentis ou des notions complexes à aborder. Cela participe à la libération de la parole chez les jeunes enfants », ajoute Gwenaelle Colomer, éducatrice jeunes enfants au sein du dispositif APPUI. Pirouette aide à travailler sur les notions d’intimité, de consentement, de limites, mais aussi de responsabilité. « Lorsqu’ils sont à l’aise, les enfants peuvent la promener en laisse, cela leur apprend à être attentifs aux besoins de l’animal, et donc au besoin de l’autre », explique Ghislaine Martiny. 

« Pirouette aide aussi à être dans l’instant présent. Sa présence a énormément facilité les échanges avec une petite fille atteinte d’un trouble du spectre autistique ». Elise est la maman de Louis, 4 ans, également atteint d’un trouble autistique. « C’est un petit garçon qui a du mal à gérer la frustration. Pirouette l’apaise, le calme, il est très délicat avec elle. Cela favorise aussi sa concentration », raconte-t-elle, « Il a une photo de Pirouette dans son cahier de vie à l’école, elle est devenue importante pour lui ». 

Des bienfaits prouvés scientifiquement

Piphi, 7 ans, avait très peur des chiens. Avec Pirouette, il a dépassé ses appréhensions et a appris à prendre confiance en lui. « Ce traumatisme avec les chiens remontait à ses 2/3 ans où il avait eu peur du rottweiler de son grand-père. Au fil des rencontres, il s’est apaisé, Pirouette l’aide aussi à s’ouvrir aux autres », témoigne son père Julien. « Au début j’avais peur, et puis je lui ai fait un gros câlin », raconte Piphi, qui aujourd’hui réclame à voir Pirouette. 

Auprès des familles comme des équipes, Pirouette apporte de la joie et de la sérénité au quotidien. Constatés au sein du Cdas, les bienfaits de la présence d’un animal sont scientifiquement prouvés. « Les chercheurs ont démontré que l’accroche du regard entre l’individu et le chien déclenche une sécrétion d’ocytocine qui est l’hormone du bonheur », explique Gwenaelle. Les professionnelles restent aussi attentives au bien-être de Pirouette. « On lui laisse toujours la possibilité de sortir de la pièce et si on constate qu’elle a déjà assisté à plusieurs entretiens sous tension, on évite de la confronter à une autre situation pour éviter un surcroît émotionnel », précise Gwenaelle Colomer. Après la phase d’expérimentation et un bilan positif, l’expérience de Pirouette au sein du CDAS est officiellement pérennisée depuis février 2025. "Pirouette est une pionnière !", conclut sa maîtresse.